Focus sur la fac de Gembloux Agro-Bio Tech.
L’association réussie de la tradition et de l’innovation.
Mêler tradition et innovation, voilà le pari de la faculté d’Agro-Bio Tech de Gembloux depuis plus de 150 ans. Quoi de mieux qu’une visite à Gembloux pour démarrer notre focus sur les facultés de l’ULiège, dans ce numéro du P’tit Torê consacré à la renaissance, à l’alliance du passé et du futur ?
Mêler tradition et innovation.
Le Doyen, le Professeur Frédéric Francis décrit la faculté selon deux mots d’ordre, la tradition et l’innovation. L’aspect traditionnel de Gembloux est très marqué, notamment au niveau des bâtiments qui abritent la faculté : l’ancienne abbaye de la ville date du XIIe siècle. Il ne faut néanmoins pas se fier aux apparences. Derrière ses remparts vétustes (“Il faut quitter ces vieux murs de Gembloux”, comme le dit la chanson) se cache une faculté des plus innovantes. Assez paradoxalement, l’innovation n’est pas un aspect nouveau ici, comme l’explique le Doyen : « Depuis vingt ans, le titre de la faculté a changé. Anciennement ingénieur agronome et chimie des bio-industries, aujourd’hui on les nomme “études de bio-ingénieur”. Ce changement a permis d’adopter une vision plus large de la section. »
L’enseignement et la recherche s’organisent selon quatre mots-clés : environnement, agriculture, alimentation et forêts. « En termes d’environnement, une partie du centre de recherche Terra s’intéresse aux changements globaux, notamment climatiques. Récemment, le jardin de pluie a été mis en place pour répondre au questionnement concernant le dualisme entre inondations et sécheresses. On y a construit un auditoire extérieur en bois, en collaboration avec les forestiers. » détaille le Doyen. Une réelle conscience environnementale émane de Gembloux. Le Doyen y accorde une certaine importance. « L’environnement fait partie de ce qu’on enseigne. Notre domaine d’enseignement nous permet d’avoir des compétences techniques pour agir par rapport au climat, que ce soit au niveau de la mobilité, de l’énergie ou encore de la nourriture (notre restaurant est fourni localement). Il y a une réelle sensibilité pour le respect de l’environnement chez notre personnel et nos étudiant·e·s. Avant même l’initiative institutionnelle de “campus durable”, notre faculté y accordait beaucoup d’importance. » souligne-t-il.
Un autre projet dont les Gembloutois·es sont particulièrement fier·e·s ? Leur bière, bien sûr. La bière de l’Abbaye est gérée par six étudiant·e·s membres de l’AG, l’Association Générale des Étudiant·e·s bio-ingénieur·e·s. Elle est brassée sur le campus par la coopérative Gembloux Beer, créée par des étudiant·e·s alumni. L’Abbaye constitue ainsi le symbole du caractère communautaire des Gembloutois·es. Triple ambrée, elle ne plait pas à tout le monde. C’est pourquoi la coopérative a ajouté trois autres bières, notamment une pils et une fruitée. Les anecdotes autour de cette boisson ne manquent pas, comme nous le raconte Marion Corajod, la responsable communication de l’AG : « Lors des élections du comité restreint de l’AG, les candidats sont invités à boire (sans obligation) un grand verre d’Abbaye sans mousse, afin de tester leurs gosiers. » Bref, Gembloux et l’Abbaye, c’est une sacrée histoire d’amour.
Réconcilier Gembloux et Liège ?
A l’inverse, Gembloux et Liège ne filent pas le parfait amour. Ou du moins, il y a de l’eau dans le gaz. Depuis 2009, Agro-Bio Tech est l’une des onze facultés de l’Université de Liège. Gembloux permet ainsi de compléter le panel des formations de l’ULiège. Néanmoins la transition n’avait jamais été complète. C’est seulement cette année académique que l’organe de représentation gembloutois a pu intégrer l’organe liégeois. Anciennement CRE (Conseil Représentatif des Étudiant·e·s), aujourd’hui il s’agit de la Fédé Gembloux, commission de la Fédération des Étudiant·e·s de l’ULiège. Ce changement rend plus simple la collaboration entre les deux entités, comme l’explique Lisa Di Maggio, secrétaire à la Fédé Gembloux : « La collaboration avec Liège se passe plutôt bien. Des représentants gembloutois y vont en réunion. Ils peuvent échanger sur nos manières de faire respectives. »
Est-ce que ça voudrait dire que Gembloux et Liège avancent vers la réconciliation ? Oui, c’est certain. Néanmoins le Doyen tient quand même à nuancer. « Une bonne dynamique s’est mise en place avec le changement d’équipe rectorale. La politique de campus est beaucoup plus affirmée. En ce qui concerne les structures de décision, une des réunions de l’année va se tenir à Gembloux. Ce serait bien que la Fédé organise une de ses réunions ici. En tout cas, j’apprécie la démarche du P’tit Torê de mettre en avant notre campus. » (Si Monsieur le Doyen approuve, que demander de plus ?) « Il ne faut cependant pas oublier les particularités qui font la faculté de Gembloux. On souhaite maintenir notre identité. » Bon, l’adage “Qui se ressemble s’assemble” ne semble pas fonctionner dans ce cas-ci, c’est tant mieux. Entre Liège et Gembloux, il y a bien sûr des différences : c’est probablement ce qui rend ce lien si particulier.
Un campus trop calme ? Loin de là.
Lorsqu’iels pensent à Gembloux, les Liégeois·es ont tendance à imaginer un petit campus, calme et perdu en campagne. « Gembloux est une petite faculté. Vous pourriez imaginer qu’on s’ennuie, mais pas du tout. Il y a beaucoup d’animations, des soirées tous les jours. » nous explique Lisa. Coline Freches, la vice-présidente à l’extérieur de l’AG s’est donnée comme mission de nous expliquer le fonctionnement de ce cercle particulier : « L’AG est une ASBL qui rassemble des étudiants membres (500 membres pour 1500 étudiants). Elle se compose de vingt- quatre commissions (par exemple, l’Agruche qui fait de l’apiculture ou la Cinsi qui gère le potager collectif). Le comité dit restreint de l’AG compte neuf personnes et le comité élargi, lui, comprend les membres de l’Office des cours, du bar et de la bière de l’Abbaye. En fait, tout est lié et c’est ce qui fait notre identité gembloutoise. » Lisa est complètement d’accord avec Coline : « Un étudiant sur trois est impliqué dans le cercle, dans une commission ou l’autre. On connaît tout le monde, c’est l’une des forces de notre campus. » Ça, on l’a bien remarqué : quand le P’tit Torê est arrivé sur place, les gembloutois·es ont tout de suite vu qu’on ne venait pas de là ! Les baptêmes quant à eux sont indépendants de l’AG. Les activités des baptisé·e·s durent un mois, durant lequel les activités de l’AG sont suspendues. Une fois le baptême terminé, on n’en entend plus parler.
L’AG est présente lors des conseils de faculté, une fois par mois. Selon Coline, c’est important d’y siéger. « Les représentants étudiants réunissent 20% des sièges du conseil, ce n’est pas négligeable. » Les délégué·e·s des différentes années siègent quant à elleux aux conseils d’études. Comme il doit y avoir une parité professeur·e·s – élèves, le nombre de délégué·e·s est important (en bac 1, il y a dix professeur·e·s et donc dix délégué·e·s). Lisa explique le bénéfice d’avoir une représentation étudiante fort impliquée : « Lorsqu’il y a un problème, il remonte très vite aux oreilles des autorités facultaires. Nous sommes bien encadrés par nos professeurs, par la Vice-Doyenne à l’enseignement ainsi que par la coordinatrice de la formation. »
Réussir à mélanger tradition et innovation. Impliquer les étudiant·e·s dans différents conseils, dans la représentation étudiante ou dans le cercle et les commissions. Se réconcilier avec Liège tout en gardant son identité propre. Qu’avons-nous à apprendre de notre visite à Gembloux ?
Ju Hamers
Photos : Antoine Humblet